02 Nov La médecine prédictive
Notion et objectifs de médecine prédictive
La médecine prédictive constitue le grand champs ouvert par les nouvelles techniques de séquençage du génome humain. Si l’objectif de la médecine curative est de soigner, diminuer les souffrances et guérir, celui de la médecine prédictive repose sur la détection chez un individu de prédispositions biologiques à telle ou telle maladie, afin de retarder, atténuer, voire prévenir son apparition. Elle est fondée sur la lecture et l’analyse du génome humain via des tests génétiques. Elle est par définition probabiliste, évaluant un risque d’apparition d’une pathologie, sans pourvoir l’affirmer avec certitude.
La médecine prédictive révèle également la sensibilité de chaque individu à une molécule en fonction de son génome, avec un potentiel risque d’effets indésirables. Ce secteur émergent, la pharmacogénétique, permet d’éviter d’administrer des médicaments inefficaces et supprimer des effets secondaires désagréables, voire mortels.
Ainsi, en France, la HAS (Haute Autorité de Santé) préconise depuis 2009 de pratiquer un test génétique au préalable de tout traitement anti VIH basé sur l’Abacavir en raison de risques d’allergie potentiellement graves. Ce risque, augmenté sensiblement chez les personnes porteuses du gène HLA-B (type 5701), est toujours pratiqué avant de débuter le traitement pour déterminer si l’individu à traiter est porteur du gène.
DPNI et DPI exclus de la médecine prédictive
Ne relevant pas d’un calcul de risque, les tests génétiques concluants avec certitude qu’une personne est atteinte ou pas d’une maladie n’entrent pas dans le cadre de la médecine prédictive :
- le DPNI (diagnostic du dépistage prénatal non-invasif) qui permettent aujourd’hui de détecter les trisomies 21, 13 et 18 sur un fœtus.
- le DPI (diagnostic pré-implantatoire), réservé aux couples identifiés ayant une forte probabilité de donner naissance à un enfant atteint d’une maladie génétique grave (maladie de Huntington, myopathie, amyotrophie spinale infantile…), maladie reconnue comme ne pouvant être guérie au moment du diagnostic.
Perspectives et limites de la médecine prédictive
C’est en cancérologie que la génomique suscite aujourd’hui le plus d’applications. Celle-ci permet en effet d’améliorer le diagnostic et de décider de la chimiothérapie la plus adéquate en fonction des altérations génétiques identifiées dans la tumeur, notamment pour les cancers du sein.
La médecine prédictive s’applique aux maladies polygéniques (mettant en cause plusieurs gènes) et polyfactorielles, pour lesquelles il est uniquement possible d’évaluer un niveau de risque. La prise en compte de l’effet combiné d’une multitude de facteurs génétiques (chacun n’ayant qu’un poids marginal) couplé à l’interaction de facteurs environnementaux (mode de vie, exposition à des toxiques) demeure aujourd’hui très complexe à étudier et à modéliser.
Malgré des opportunités prometteuses, les enjeux rattachés à ce domaine sont complexes, tant sur le plan scientifique que sur les plans social ou sanitaire. En se développant, la médecine prédictive pourrait avoir un intérêt sur le plan sanitaire, et notamment déclencher des actions de prévention.
Néanmoins, cela pose la question de stratégies préventives et thérapeutiques à adopter face à un risque par nature incertain. Est-ce que la connaissance du risque pourrait générer un stress supplémentaire pour les individus, avec les répercussions négatives associées ? Ou modifier les comportements, incitant à la prise de risque pour ceux chez qui le niveau de risque est négligeable ?
Sur le plan social, les individus devront être couverts contre toute discrimination liée à la médecine prédictive. Il faudra également réfléchir aux systèmes d’assurance santé : la connaissance fine des risques individuels pourrait entraîner un délitement, ou du moins un affaiblissement, de la solidarité et de la couverture mutualisée du risque santé.
Un encadrement législatif strict en France
En France, la loi relative à la bioéthique fixe un cadre très strict aux tests ADN et leur utilisation. Un test ne doit être entrepris que dans un but judiciaire, pour la recherche scientifique ou dans un but médical. Il peut alors s’agir de confirmer le diagnostic d’un patient présentant les symptômes d’une maladie génétique, de rechercher une maladie héréditaire en l’absence de symptômes, de permettre un choix éclairé en matière de procréation, etc. Les praticiens qui font les analyses doivent avoir un agrément de l’Agence de la biomédecine.
Les tests doivent être prescrits par un médecin qui doit recueillir le consentement signé du patient, ou bien de ses parents s’il s’agit d’une personne mineure. Dans ce dernier cas, il faut impérativement que le patient ou sa famille tire un bénéfice médical du test, c’est-à-dire des mesures préventives ou curatives immédiates.
L’accompagnement du patient par un conseiller en génétique et des psychologues lors du protocole est capital étant donné l’angoisse et les mauvaises interprétations que les résultats peuvent causer. Les tests Internet, outre une fiabilité parfois controversée, n’offrent souvent aucun suivi de ce type.