«L’APBM veut accélérer l’accès à l’innovation» – Le Quotidien du Médecin

« L’amélioration des connaissances des politiques, prescripteurs et patients concernant la biologie médicale est une nécessité pour permettre à tous et sur tout le territoire, de bénéficier d’un accès égal aux dernières innovations. Durant ces dix dernières années, la biologie médicale a connu de profondes mutations tant dans son organisation, le contrôle de sa qualité, sa relation au patient qu’au niveau de sa performance.»  
Dr Alain Le Meur, Président de l’APBM

Des tests génétiques de plus en plus poussés permettent, notamment, de prédire le surplus de risque de survenue de certaines maladies par rapport à une population témoin. C’est, par exemple, le cas dans le cancer du sein avec l’identification chez la patiente de mutations BRCA1 et BRCA2. Avec la généralisation du séquençage du génome, le profil génétique ou le génotype est de plus en plus précis à la naissance, et même avant, dans le cadre du diagnostic prénatal. La biologie est, ainsi, devenue un outil de prévention de pathologies potentiellement graves, mais aussi, une aide précieuse à la prescription.

« Aujourd’hui, la thérapie ciblée est le domaine de prédilection de la biologie prédictive. Dans le cas du cancer du poumon non à petites cellules avancé, par exemple, le statut mutationnel de la tumeur (en ce qui concerne l’EGFR) est un élément essentiel pour choisir le traitement le plus adapté à chaque patient (chimiothérapie ou thérapies ciblées) » , rappelle le Dr Alain Le Meur, directeur du développement du laboratoire Biogroup-LCD, président de l’Association pour le progrès de la biologie médicale (APBM).

L’identification d’une mutation du gène de l’EGFR se fait à partir d’un échantillon biologique (biopsie ou sang total). Le test diagnostique consiste à décrypter l’ADN tumoral pour identifier les mutations de l’EGFR.

« Les résultats du test permettent à certains patients de bénéficier de thérapies ciblées constituant une alternative à la chimiothérapie, avec moins d’effets secondaires et des médianes de survie qui s’améliorent », assure le Dr Le Meur. La biologie prédictive n’en est, certes, qu’à ses balbutiements. Mais, à l’avenir, de plus en plus de pathologies devraient pouvoir être prévenues et traitées de façon personnalisée grâce à l’analyse du génome humain.

Secteur en pleine croissance, la biologie prédictive est représentée en France par les laboratoires membres de l’APBM, spécialistes dans ce domaine et à l’échelle européenne : Biomnis, Cerba et Synlab Labco. Innovante et compétitive en matière de biologie médicale, la France souffre, néanmoins, de plusieurs freins à l’accès aux tests génétiques prédictifs.

« Ces tests ne sont pas pris en charge par l’Assurance maladie. Ils sont financés par le biais d’enveloppes confidentielles – souvent, initialement dédiées à la recherche – et exclusivement réservées à la sphère publique : seuls les patients pris en charge en centres anti-cancer ou CHU en bénéficient gracieusement », souligne Étienne Couelle, DG France Synlab Labco, une structure fondatrice de l’APBM.

Or, en France, en termes d’analyses médicales, le maillage territorial est assuré par les laboratoires privés. Une grande partie de la population française réside dans des zones de désert médical et n’est donc pas prise en charge dans le cadre d’un CHU. « Pour cette population, le moyen le plus rapide d’effectuer ces tests génétiques innovants serait d’y avoir accès via un laboratoire de biologie médicale proche du domicile (aucun Français ne réside à plus de 20 km d’un laboratoire). Or, aujourd’hui, ces tests sont effectués dans les établissements publics : les médecins de ville n’ont donc pas toujours le réflexe de les prescrire», indique Étienne Couelle.

Le clivage public/privé en termes de financement pose, ainsi, un problème d’égalité en termes d’accès aux tests biologiques innovants. D’après Olivia de Roubaix, secrétaire générale d’Unilabs, membre fondateur de l’APBM, « le lancement du DPNI en France (test génétique de diagnostic de la trisomie 13, 18 et 21), retardé par des discussions relatives à son inscription à la nomenclature des actes de biologie remboursés, est une belle illustration des freins à l’innovation. Dans cet exemple, des arbitrages d’enveloppes budgétaires retardent l’accès des patientes à ce nouveau test non-invasif ».

Pour permettre aux médecins et patients de mieux connaître les dernières nouveautés dans le domaine de la biologie et être informés des derniers tests/marqueurs, l’APBM souhaite créer un « observatoire » (plateforme nationale dédiée à l’innovation en biologie).

« Nous avons également prévu de rencontrer nos dirigeants dans les mois à venir pour discuter notamment d’un financement plus équitable de l’innovation en biologie et donc, d’un meilleur accès aux tests innovants », conclut le Dr Le Meur.